« Inferno 1 »
Lavis à l’encre sur papier de soie
Ink washes on silk paper
100 x 180 cm

« Inferno 2 »
Lavis à l’encre sur papier de soie
Ink washes on silk paper
100 x 180 cm

« Sargasses 1 »
Lavis à l’encre sur papier de soie
Ink washes on silk paper
100 x 180 cm

« Sargasses 2 »
Lavis à l’encre sur papier de soie
Ink washes on silk paper
100 x 180 cm

« Sargasses 4 »
Lavis à l’encre sur papier de soie
Ink washes on silk paper
100 x 180 cm

« Reflux »
Lavis à l’encre sur papier de soie
Ink washes on silk paper
100 x 180 cm

« Traces 1 »
Lavis à l’encre sur papier de soie
Ink washes on silk paper
100 x 180 cm

« Traces 2 »
Lavis à l’encre sur papier de soie
Ink washes on silk paper
100 x 180 cm

« Traces 4 »
Lavis à l’encre sur papier de soie
Ink washes on silk paper
75 x 100 cm

« Le Cri 1 »
Lavis à l’encre sur papier de soie
Ink washes on silk paper
75 x 100 cm

« Le Cri 3 »
Lavis à l’encre sur papier de soie
Ink washes on silk paper
75 x 100 cm

« Marée noire 1 »
Lavis à l’encre sur papier de soie
Ink washes on silk paper
30 x 30 cm

« Marée noire 2 »
Lavis à l’encre sur papier de soie
Ink washes on silk paper
30 x 30 cm

« Marée noire 3 »
Lavis à l’encre sur papier de soie
Ink washes on silk paper
30 x 30 cm

« Marée noire 4 »
Lavis à l’encre sur papier de soie
Ink washes on silk paper
30 x 30 cm

« Marée noire 14 »
Lavis à l’encre sur papier de soie
Ink washes on silk paper
30 x 30 cm

« Transition 1 »
Lavis à l’encre sur papier de soie
Ink washes on silk paper
30 x 30 cm

« Transition 2 »
Lavis à l’encre sur papier de soie
Ink washes on silk paper
30 x 30 cm

« Mort amère 1 »
Oeuvre tridimentionnelle en gaze et papier cristal
Tridimentional work in cheesecloth and cristal organza
55 x 110 cm

« Mort amère 2 »
Oeuvre tridimentionnelle en cartapesta – techniques mixtes
Tridimentional work in cartapesta – mixed technics
10 x 40 cm

« Plumes mortes »
Oeuvres tridimentionnelles en gaze et cartapesta – Techniques mixtes
Tridimentional works in cheesecloth and cartapesta – Mixed technics
10-13 x 55×70 cm l’unité

Préface – Mer amère

Devant nous, de grands lés de papier de soie légers et diaphanes, comme une grande lessive offerte au vent, comme des voiles ou des linceuls, ou comme de hautes pages où écrire sa colère. Car c’est d’abord de colère qu’il s’agit ici, à la mesure de l’indignation de Margaux Tartarotti à voir depuis les rivages qu’elle a pu fouler, du Costa-Rica aux calanques de Marseille, la mer immense et magnifique, le « toit tranquille où marchent des colombes » qu’a pu célébrer Valéry, et d’où procède toute vie, aujourd’hui humiliée, dénaturée et profanée peut-être sans retour par nos folles inconséquences.

Mais en même temps qu’elles alarment notre conscience, ces œuvres, dans leur retenue et leur humilité même, émeuvent en nous quelque chose de plus obscur et de plus secret. La sincérité du témoignage le plus accablant ne pouvant suffire à faire œuvre, Margaux Tartarotti convertit la plus légitime des émotions en une démarche poétique exigeante, la quête obstinée de ce que fut notre expérience de la mer et qui demeure, tissée d’images et de mythes, aux profondeurs de notre mémoire. Ainsi de ses couleurs changeantes, de ses courants, de sa puissance, comme de tout ce qu’elle porte en notre imaginaire d’aventure et de liberté, de mystère et d’infini.

Une révolte instinctive a commandé au choix du thème – que les belles séries de Cimetière marin et de Marée noire ont déjà exploré – comme à celui des moyens techniques. L’urgence de dire la violence faite à toutes les mers du globe paraît dicter une sorte d’emportement du geste, autant que de la manipulation du papier de soie, tour à tour lavé, essoré, froissé, repassé avant d’être brossé d’eau et d’encre. Mais à évoquer la figure maternelle d’une mer meurtrie, le geste se fait caressant, attentif à ce qui change l’encre en lumière, mettant en œuvre par un merveilleux bricolage, aussi hasardeux que savant, le protocole d’une réparation et d’un espoir dressés contre le désenchantement et la perte.

Margaux Tartarotti dit avoir « toujours été fascinée par l’incroyable beauté des figures fugitives, formées au hasard sur le sable, pendant quelques secondes par l’eau qui se retire » et confie sa volonté de « reproduire cette magie ». C’est assurément à la vérité d’une expérience originelle de ravissement que renvoie ce propos. « Figures fugitives », lueurs ou palpitations intermittentes, ces signes affleurant sous la surface altérée du monde, comme s’il nous était donné de voir, dit Yves Bonnefoy, « les étoiles d’un autre ciel », sont en effet magiques autant qu’ils accordent à qui les saisit le sentiment irrépressible d’une plénitude, d’un accord avec une présence immédiate, qui dans le même instant paraît et se dérobe.

Seule l’œuvre d’art peut alors recréer de telles expériences. De là ce ressac silencieux, ces tentatives et ces abandons, ces panneaux en succession de vagues semblables et toujours différentes, faisant de la mer un palimpseste illimité où parfois transparaît ou se noie la parole humaine impuissante. Le défi éthique s’accomplit ainsi en un pouvoir poétique indéniable. Margaux Tartarotti fait de l’encre et du papier de soie les truchements inépuisables de son combat et de sa rêverie. Jouant des transparences, s’émerveillant des voies choisies par l’encre en ses nuances infinies, de l’interaction de formes abstraites et de traces d’écriture, elle demeure aux aguets d’une image entrevue comme en songe, venue d’une très ancienne mémoire, celle d’une mer féconde et pure, aux lueurs de nacre et aux reflets d’écailles foisonnantes dont la simple beauté comble le visiteur.

Jean-Louis Vidal,
Président du Centre d’Art Jean-Marie Granier

Ma démarche artistique pour « Mer amère »

Thématiques

“Mer amère” se place dans le prolongement du thème “Cimetière marin”, que j’ai exposé sous différentes formes les années précédentes, et fait suite à l’exposition-installation réalisée à Toronto en début 2017 sous le nom “Marée noire”.
Je cherche ainsi à illustrer les conséquences de nos moments de négligences, qui se transforment parfois en folies collectives – pollution en tout genre, maltraitance de nos milieux naturels –  avec une attention particulière pour les milieux marins.
J’observe le phénomène au gré de mes recherches, des plages du Costa Rica aux calanques de Marseille. Je m’informe aussi auprès des sources spécialisées.(1)
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(1) Merci en particulier à Denis Ody, océanologue, Responsable du Pôle Océans et côtes du WWF-France (World Wildlife Fund – Fonds Mondial pour la Nature)

Choix artistiques

Créer quelque chose à partir de rien, accorder une part au hasard, utiliser une palette de couleurs sourdes, concevoir une scénographie minimaliste, voilà le condensé de mes choix artistiques.(2)

Dans “Mer amère”, j’expose, pour l’essentiel, un ensemble de panneaux abstraits, dans lesquels la mer d’origine, vivante et pure, n’est plus qu’un souvenir, sa matière même, l’eau, étant devenue stérile. En créant cet ensemble sombre, presque d’apocalypse, je cherche à plonger celles et ceux qui visiteront l’installation dans une ambiance piquant la curiosité et invitant au questionnement
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(2) Mes artistes préférés viennent de l’Art informel (Alberto Burri, Lucio Fontana) ou de l’Arte Povera (Michelangelo Pistoletto, Pino Pascali). J’aime aussi beaucoup les travaux d’Antoni Tàpies et d’Anselm Kiefer.

Matières et réalisations

Pour cette exposition-installation, j’ai travaillé pour l’essentiel le lavis à l’encre sur papier de soie, avec des exceptions en cartapesta et plastique de récupération.
J’ai toujours été admirative et fascinée par l’incroyable beauté des figures fugitives, formées au hasard dans le sable, pendant quelques secondes après marée haute, par l’eau qui se retire. Dans ma quête pour reproduire cette magie, je trouve que l’eau, l’encre et le papier de soie, sont des matériaux idéaux.
Au terme d’un long processus, où je me laisse parfois guider par le hasard et où parfois je l’apprivoise, et dont toutes les étapes, depuis la façon de froisser le papier, d’utiliser l’eau et l’encre, influent sur le résultat final, j’observe avec un mélange d’émotion et de curiosité les figures un peu magiques, formées par le papier buvant petit à petit l’encre noire. Si j’y trouve les nuances et les effets recherchés, je garde, sinon je jette.

Margaux Tartarotti

Margaux Tartarotti & Heidi Leverty:
Marée Noire at Walnut Contemporary

The sea, with all its dynamic temperaments and inexhaustible stretches, has been engaged in a finicky relationship with humankind since the onslaught of the industrial revolution. Unfortunately, these vast water basins that give home to many vital ecosystems filled with an abundance of unique life forms, have become a breeding ground for toxic waste disposal and calamitous petroleum spills. Contemporary photography reveals the extent to which these unnatural disasters have strained the daily lives, mating habits, and health of those engaged with pelagic environments. Images of innocuous birds drenched in oil, where their lustrous feathers are seemingly marred by a thick opaque mass, encapsulate the global crisis of one of Earth’s oldest and most indispensible ecological structures.

 

Installation view of Marée Noire by Margaux Tartarotti  and Heidi Leverty

Throughout the history of art, artists have been known to align their painterly practices with the swellings, upsurges and capaciousness of the sea. This work, simply referred as the visualization of the philosophically charged notion of “The Sublime”, is most resonant on the canvases of J.M.W. Turner, Caspar David Friedrich and other nineteenth-century Romantics. In their paintings, oceanic landscapes were depicted as a robust natural force, an ironclad fist ready to deliberately pummel any humanly intruders brave enough to explore this potentially deadly terrain. However, in the hands of contemporary artists Margaux Tartarotti and Heidi Leverty, these once-ominous yet transcendent bodies of water are stripped of their foreboding nature and rendered futile and pained. “Marée Noire”, the twin sisters’ latest exhibition on-view at Walnut Contemporary, sees the artists allying themselves with modern day artistic forays into activist art, although in a more abstracted manner.

While the identical twins may find many commonalities between themselves, personality and interest-wise, their artistic execution remains quite dissimilar from one another. Tartarotti presents her work in the form of painting and sculpture, while Leverty utilizes the photographic medium to manifest her sociopolitical ideas. However, both artists stick to a strictly brooding colour scheme, rarely rendering their works outside the realm of neutral tones and vivid blackness. In a dual exhibition, the sisters allow their distinct artistic endeavors to reflect, comment upon, and compliment each others’ oeuvres, showcasing a thematically-succinct sister act.

 

Installation view of Marée Noire by Margaux Tartarotti (front) and Heidi Leverty (on the wall)
at Walnut Contemporary, 2017. Courtesy of Walnut Contemporary

Discussing Tartarotti’s contributions to Marée Noire will immediately strike a solemn chord amongst gallery attendees. Inspired by recent natural fiascos involving faulty sea vessels transporting oil, the artist concentrates her work on the helpless marine animals and aquatic landscapes affected by these unintentional spills. Tartarotti whose livelihoods become submerged in a thick and often dangerous sludge of human necessity and greed. However, most notable is the series of large panels installed in the center of the exhibition, which act as an all-encompassing focal point.  Visualized as aerial images of these specific sites of tragedy, the  water’s free-flowing essence is rendered still by the viscous application of oily black, undermining the splendour of oceanic life.

Leverty’s photographic contributions are less recognizable in appearance, using a form of abstraction to demonstrate the collapse of natural beauty under industrialized means. However, Leverty’s work emits a meditative quality that soothes the more confrontational efforts of Tartarotti, providing a stark tranquility to the exhibition.

Gallery owner Ibérina Raquel Vilhena nullifies traditional modes of presentation through a more contemporary means of installation. The art is displayed in a method that warrants a more thorough  phenomenological presence, as viewers assume a role as an explorer of these unfavorable terrains, uncovering the often-entropic  destruction we inflict on our surrounding bionetworks. In an ever-escalating discourse on global climate change and human intervention, Tartarotti and Leverty confront such concerns as only an artist can, through a distinct visual acumen that is both telling and  universal.

David Saric
ARTORONTO.CA